L’art japonais et le raffinement dans l’empire du soleil levant

L’art japonais et le raffinement
dans l’empire du soleil levant

03/12/2024
Clémence Mourouvin

« SHIMAGUNI » ou le « pays insulaire », ainsi se plaisent à qualifier leur pays de nombreux Japonais, comme pour en souligner les caractéristiques uniques au monde : un arc insulaire et volcanique qui s’étire sur 3000km de long, sur la « ceinture de feu » du Pacifique, formé de 4 îles principales et d’une myriade d’îlots (3600) où la montagne domine largement plaines et rizières.  Au-delà des chiffres, une géographie aussi contrastée a profondément façonné l’âme japonaise et une sensibilité qui reste, malgré l’urbanisation massive, intimement liée à la nature et à l’expérience émotionnelle que son spectacle procure.

Au fil du temps, l’archipel a traversé des moments pleins de turbulences marqués par de longues périodes d’occupation et d’autarcie. Il en résulte aujourd’hui une forme de syncrétisme, qui confère aux arts japonais un attrait puissant et une part de magie que l’on ne trouve nulle part ailleurs.

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Art du bain

L’art du bain au Japon est un rituel ancestral qui allie épanouissement spirituel et propreté du corps. C’est une des rares pratiques ancestrales, liée au bouddhisme, que les Chinois n’ont pas importée au Japon. Il y a 2000 ans déjà, les Nippons se baignaient dans les innombrables sources chaudes naturelles connues pour leurs vertus thérapeutiques. A l’origine, dès le VIe siècle, il s’agit d’un rituel de purification avant d’entrer au temple. Par la suite, vers le 8e siècle les sentô (bains publics) font leur apparition dans tout le Japon. Au fil des siècles, avec le développement des centres urbains, le bain devient un lieu de détente et de plaisir hédoniste.

Depuis les années 70, la salle de bains dans les maisons japonaises a peu à peu entraîné la fermeture des bains publics. Mais il reste un facteur de lien social fort et si quelqu’un prend un bain trop court il entendra dire qu’il se baigne… comme un corbeau !

Ainsi, l’art du bain subsiste grâce aux « onsens » : on s’y prélasse à plusieurs dans de petits bassins d’eau chaude, plus de 35°C et souvent face à une vue magnifique. Le moment du bain est aussi un moment propice à la méditation. Mais attention, pour faire trempette, dans les règles de l’art, il faut au préalable s’être soigneusement lavé et savonné avant d’y pénétrer nu (les bains communs ne sont pas mixtes). Lors d’un séjour au Japon, laissez vos vêtements et vos soucis au vestiaire, et ne manquez pas de vous initier à cet art de vivre à la japonaise !

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Art du thé

C’est vers le VIe siècle que sont introduits les premiers théiers en provenance de Chine, sans doute par des moines qui rapportent des feuilles de thé vert dans leurs bagages. A partir des années 800, le thé s’ancre peu à peu dans la tradition japonaise, lorsque l’Empereur Saga le goûte et en répand la culture autour de l’actuelle Kyôto. Longtemps réservée à l’élite, cette boisson très appréciée pour ses vertus médicinales, se répand aux XIIe et XIIIe siècles dans les monastères Zen, car elle permet de lutter contre la somnolence lors des séances de méditation. Comme en Chine, dans les temples, l’on sert aux notables des bols de thé vert. Les feuilles entières sont broyées en fine poudre verte (matcha) pour en préserver tous les éléments nutritifs, déposées dans un bol où l’on verse de l’eau chaude que l’on mélange avec un petit fouet en bambou.

La cérémonie du thé ou sadō devient l’apanage des classes dirigeantes tandis que les pavillons de thé sont investis par la classe guerrière qui la pratiquent avec plus d’ostentation. Le rituel très codifié se démocratise au XVIe siècle grâce à Sen No Rikyu, un grand maître du thé, qui le simplifie en utilisant des objets simples accessibles à tous : louche en bambou, carré de soie, spatule, bol et boîte à thé. La philosophie japonaise prône la simplicité et l’isolement du monde extérieur (le thé se boit dans un lieu dépouillé et clos) pour atteindre un état de concentration zen, propre à l’éveil spirituel.

La cérémonie du thé avec ses ustensiles, ses règles, son esthétique, influença de nombreuses expressions artistiques : architecture, céramique, vannerie, laque, jardins…Véritable havre de paix, le jardin de thé est une composante de l’espace méditatif lié à la cérémonie du thé : il permet la transition du monde extérieur à un monde intime.

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Art du tatouage

Au Japon, le tatouage est un art même s’il est peut-être l’art le plus controversé. Les premiers ouvrages imprimés au Japon sur le sujet datent du VIIIe siècle. On y distingue un tatouage noble, réservé aux personnes illustres, et un tatouage à la connotation négative, réservé aux criminels. Pendant longtemps, cette pratique ancestrale désigne des groupes sociaux en marge: criminels (comme les Yakuzas), prisonniers et autres résidentes de quartiers de plaisir. Il n’est d’ailleurs pas rare de voir encore aujourd’hui que dans les « onsens » les tatouages sont interdits. Aujourd’hui la mondialisation a quelque peu assoupli la mentalité japonaise sur ce sujet. Du tatouage pénal, on est passé au tatouage décoratif, avec des motifs animaliers (dragon, tigre, carpe) ou issus des arts traditionnels, des estampes ou des histoires populaires.

Mais l’« Irezumi » qui désigne un tatouage couvrant de larges parties du corps, voire intégral, reste tout de même mal accepté au Japon. Sa réalisation peut prendre jusqu’à 5 ans et nécessite de gros moyens financiers (jusqu’à 30 000 dollars). Le tatoueur, lui, tient son savoir de son maître qui lui apprend pendant de nombreuses années à composer les encres, nettoyer le matériel et bien sûr reproduire les désirs de la personne qui souhaite se faire tatouer. Parfois il réalise sur lui-même les motifs qu’il pourrait être amené à reproduire.

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Jardin japonais

Le jardin japonais forme sans doute l’un des clichés sur le pays les plus répandus, mais quel beau cliché ! Loin du jardin occidental, il fascine par son esthétique qui allie les courbes et les asymétries. Le jardin japonais recrée dans un espace clos, assez réduit, en ville ou dans l’enceinte d’un temple, un paysage naturel propice au repos et à la méditation. Cet art de l’idéal miniature remonte au VIIIe siècle, influencé par le style chinois, mais avec plus de sobriété. Tous les éléments naturels y sont intégrés : l’eau et la roche, du sable ou du gravier, mais aussi des éléments décoratifs, lanternes, bassins, statues… Le jardin zen est un jardin sec (comme celui de Ryoan-Ji, classé au Patrimoine mondial par l’Unesco), composé de rochers, de mousses et de graviers soigneusement ratissés.

Hommes politiques, aristocrates et hommes d’affaires ont fait aménager des jardins privés magnifiques, aujourd’hui inscrits au patrimoine national par le gouvernement.

Le paysagiste japonais joue sur des perspectives en trompe-l’œil avec la taille des éléments proches et lointains. Il cherche à créer un havre de paix. Un espace clos où chacun peut s’oublier, loin du vacarme des villes, un morceau de nature au beau milieu des gratte-ciels.

L’une des nombreuses traditions japonaises est l’art des Bonsaïs. Quel Occidental n’a éprouvé un profond embarras en s’efforçant de faire prospérer cet arbre miniature dont la croissance est désespérément imperceptible à nos yeux et dont le feuillage finit par sécher irrémédiablement en dépit de tous nos bons soins ? C’est que le délicat bonsaï relève d’une ancienne technique (VIIe siècle) sans doute très affûtée que l’on doit aux Chinois. Les Japonais s’en emparent au XVIIe siècle et améliorent cette pratique initialement réservée à la noblesse et qui gagne peu à peu toutes les classes sociales. Comme l’art floral, cet objet d’art vivant symbolise la relation de l’homme avec le ciel et la terre.

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Art du sabre

Le sabre est un autre symbole du Japon. On le retrouve dans plusieurs arts martiaux (budō) japonais, comme le kenjutsu, ou « technique du sabre » des Samouraïs. Le Budō’ ou « voie de la guerre » désigne l’art martial comme mode de vie, avec une dimension physique mais aussi morale et spirituelle. Il en existe plusieurs sortes. D’abord en bronze, la lame est ensuite en fer puis en acier trempé. Le tamahagane, métal issu du tatara, le bas fourneau traditionnel japonais, fournit un acier traditionnel très dur, grâce à sa forte teneur en carbone, qui entre dans la composition des sabres japonais.

Au Moyen-Âge, dans un Japon pas encore unifié, plusieurs clans se battent pour la domination de ces îles. A cette époque, les guerriers disposent d’une lame droite à double tranchant importée du continent. Puis, le sabre tachi est le premier sabre japonais forgé, légèrement courbe et long, il est détrôné par le katana, plus court, plus maniable et… plus efficace sur les champs de bataille, surtout à cheval. Le tachi survit dans un rôle d’apparat et de cérémonie et devient alors plus une œuvre d’art qu’un vrai sabre. Doté d’une lame plus courte, le wakisashi associé au katana forme une arme redoutable qui reste l’apanage des seuls samouraïs. Le katana, véritable emblème du pouvoir des Samouraïs reste un objet mythique et très coûteux. Quant au ninjato, il est, comme son nom l’indique, le sabre utilisé par les ninjas, guerriers regroupés en clans, qui sévissaient dans des missions d’espionnage, d’intimidation ou d’assassinat…

Depuis ces temps anciens, l’art du sabre, transmis de génération en génération, n’a pas disparu et leur créateur reste un personnage respecté.

La confection d’un sabre nécessite encore aujourd’hui cinq semaines de travail. Celui du forgeron est le plus long, il requiert plus d’un mois pendant lequel l’acier est travaillé sans relâche pour obtenir de fines galettes, elles-mêmes martelées jusqu’à former un bloc homogène. Puis vient la trempe. La lame est enduite d’un mélange d’argile et de poudre de charbon (entre autres) puis plongée dans l’eau froide. Ce travail minutieux procure à la lame dureté et souplesse. Enfin le polissage confère au sabre son aspect esthétique.

Attention à la déclaration en douane, si vous décidez d’en rapporter un dans votre valise !

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Geishas

Le personnage de la Geisha fascine les Occidentaux par son mystère et les rituels secrets auxquels elle se livre dans un univers clos. La Geisha est une « pratiquante des arts ». Eduquée dès son plus jeune âge aux différents arts japonais tels que la musique, la danse, la cérémonie du thé, l’art floral, son rôle est de distraire et divertir les hommes aisés par leur conversation et leurs nombreux talents… Parée d’un kimono de soie chatoyant, noué dans le dos par une large ceinture (obi), les cheveux décorés d’ornements raffinés, la Geisha est donc une artiste accomplie entièrement dédiée au divertissement masculin.

La tradition des Geishas (qui au début étaient des hommes) remonte au XIVe siècle, à l’ère Muromachi puis s’est largement développée au XVIIIe et XIXe siècles, durant l’ère Edo qui en comptait plus de 200.000. A cette époque, les maisons de thé prolifèrent et servent d’écrin aux dîners et aux rencontres. Cette maîtrise « artistique » est reconnue officiellement comme profession en 1779. Elles doivent exercer dans des quartiers réservés, les Hanamachi ou « villes-fleurs ».

De nos jours les Geishas sont très recherchées par les hommes de pouvoir qui les engagent notamment pour la cérémonie du thé. Elles ne sont plus que 1500 professionnelles, en majorité à Kyoto, et moins de 200 jeunes filles, se forment à ce métier.

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Club Faune Voyages vous emmène découvrir à votre rythme le pays du Soleil Levant, et tenter de comprendre un peuple aux contrastes subtils. Au fil de l’eau, lors d’une croisière dans la mer de Seto, sillonnée jadis par pirates et commerçants, ou à bord d’un train de luxe pour vivre une expérience unique sur l’île de Kyushu, tous les moyens sont bons pour tenter de percer les mystères de la culture japonaise.

Un voyage sur mesure au Japon est le moyen idéal de s’initier à cette culture pleine de raffinement et de paradoxes, et d’appréhender une identité singulière et plurielle, où modernité déjantée et traditions ancestrales s’affrontent pour mieux fusionner.

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